Xoana

Que les mannequins soient par nature ambigus, on le sait. Des thèmes du double, du masque et de la séduction, je ne dirai rien ; on a trop glosé là-dessus : mieux faut relire Barthes et Baudrillard, ou se replonger dans la mythologie grecque. Remarques simplement que les mannequins photographiés au travers de vitrines par Jean-Jacques Dorne ont parfois des allures d’androgynes. J’aime leurs traits figés dans la cire, le carton bouilli ou le gypse.

La société va au métissage, sans doute et l’histoire de ce siècle, depuis les institutions aux affaires d’abysses de Cézanne et de Matisse, est celle des transgressions. Transgression du cadre, transgression des sujets traditionnels, transgression des hiérarchies convenues. Aussi verrons-nous quelques plasticiens cajoler et griffer, lacérer et caresser, d’aucunes des photographies présentées. Mais papier (fût-il glacé) et peinture n’ont pas fini de se faire l’amour…

Une prédilection semble s’affirmer chez Jean-Jacques Dorne pour le 1925. Certaines photographies me portent au rêve ; j’y retrouve l’ambiance des sleepings transcontinentaux, et y croise quelque héroïne de Morand. Versons une larme sur les grands paquebots… Je vous quitte, une femme m’attend au Florian, vêtue d’un tailleur Chanel. La lumière est belle sur Venise en cette fin novembre, et l’acqua alta n’est pas pour nous déplaire. Nous avons à parler des sanguines de Guardi, et puis, mon chocolat à la cannelle risquerait de refroidir.